Remember Charles de Steeve Renombo, un plus pour les lettres gabonaises

Dans cette rubrique, Hance Wilfried Otata nous convie à lire cette oeuvre qui arrive à point nommé. Figure héroïque? Héros pour qui? Quel héroïsme doit être célébré à travers la figure de Charles N’tchoréré? En quoi le parcours de ce dernier  et sa mise en scène fictionnelle viennent interpeller notre contemporanéité? Lisons.

Remember Charles de Steeve Renombo, un plus pour les lettres gabonaises.

Le milieu universitaire fait déjà l’expérience de son savoir-faire. En effet, Steeve Renombo, initié en littérature, est un comparatiste spécialiste de théorie et de poétique littéraires. L’homme nous a habitué à des publications dans le genre, à un programme télévisé court consacré à la popularisation d’œuvre de fiction, quelques rôles au cinéma. Toutefois, depuis quelques mois, l’universitaire n’est plus seulement un critique mais un critique-écrivain à qui nous devons un roman intitulé Remember Charles[1].

Un roman historique

En littérature gabonaise, nombreuses sont les œuvres qui entretiennent une relation avec un passé proche ou lointain. Cependant, aucune ne s’est autant plongée dans l’Histoire comme celle de Steeve Renombo. Le roman est la somme d’un voyage au milieu de références historiques et une fictionalisation de cette expérience. Le lecteur appréciera différentes sources mentionnées : Les archives de l’association Charles N’Tchoréré, Charles N’Tchoréré, face aux nazis (Louis Bigman), Charles N’Thcoréré, un héros gabonais mort pour la France de Patrick Mkossaud (R.C., p. 35-36), pour ne citer que ceux-là.

On apprécie également une langue littéraire fluide, accessible à tout type de lecteur. Chacun constatera en effet l’efficacité d’une langue simple mais talentueusement travaillée, racontant la vie complexe d’une figure historique banalisée au fil des années. Le lecteur fera l’expérience depuis la première page de cette littérarité pour tous.

Les rideaux de la chambre sont de larges pièces rectangulaires de lin sombre, dont les coutures latérales dessinent un liseré doré. Mal ajustés par endroits et régulièrement soulevés par l’air pulsé du climatiseur, ils dévoilent des interstices par lesquels s’infiltre la lumière crue du jour naissant, par faisceaux perforant l’opacité de la pièce, comme si des sabres de lumières taillaient une matière obscure. Recroquevillé sur le lit engoncé dans les couvertures, j’écarquille mes yeux qui s’efforcent au jour, dans cette atmosphère irréelle baignée de clair-obscur (R.C., p. 13).

Description poétisée de la pièce, personnification de la lumière, comparaison des rayons de lumière à des sabres pour indiquer le lever du soleil. Le tout agrémenté par le réveil du personnage-narrateur. Le roman s’ouvre habillement sur un début de jour, une mise en abyme du commencement du texte.

Un roman aux prises avec lactualité

Voici un autre des avantages du roman de Steeve Renombo, il prend sur lui de traiter des préoccupations contemporaines liées à la dimension socio-polotique. L’auteur veut répondre « au délitement du tissu social » gabonais soumis à des clivages politiques, à la marginalisation de l’Afrique dans l’Histoire mondiale. Concernant la fragilisation du corps social, Selon lui, remettre en perspectives des héros dans l’imaginaire collectif serait une voie de solution ; d’où l’appel au souvenir du Capitaine Charles N’Tchoréré :

J’ai beaucoup réfléchi au sujet du délitement corps social, corps de valeur, et je crois que l’une des pistes est la réappropriation de notre histoire dans ce qu’elle a d’exemplaire et de valeurs, l’exaltation de nos figures héroïques.

Tu sais, je veux dépoussiérer cette notion si vieille de patriotisme (R.C., p. 34).

L’officier gabonais serait l’expression d’une axiologie bénéfique dans le but de souder le lien national.

Roman historique pédagogique

Dans l’optique d’une popularisation de notre passé, une Histoire conforme à la condition gabonaise, ce roman serait un outil efficace. Dans les milieux universitaires, scolaires, culturels, il peut être un excellent point de départ de réflexion pour instruire le plus grand nombre sur une partie de notre glorieux passé et sur cette figure militaire africaine. Il suffit de juste présenter le Capitaine Charles N’Tchoréré en héros sans dire les raisons d’un telle assertion.

Remember Charles, une œuvre dont le qualificatif « littéraire » est totalement justifié dans une époque où la confusion gagne de plus en plus le milieu scriptural vert jaune bleu.

H.W. Otata

[1]             En abrégé R.C.

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