BÉRÉZINA
Bérézina
À Buuhm Iks
Mon Président est un cimetière ambulant
Il crée des charniers, en tête de proue,
Avec son escorte, partout
Ils sèment la désolation ils la nomment paix.
Pour nous c’est le qui-vive perpétuel…
Mon président aime mon corps
C’est pourquoi, avec sa serpette, son hoyau,
Ou avec ses hoplites de fortune peu importe
Il prendra mon corps
En usera comme un enfant avec son hochet.
Mon président jouit
Quand mon corps est éparpillé
Comme offert à de sombres déités
Mon président rit
Quand mon corps est étêté
Comme à un taurobole d’un genre nouveau
Mon président se réjouit
Quand mon corps est égoutté.
On l’aurait souhaité fraternel boyscout
Ce n’est qu’un tonton macoute.
Mon président aime les nymphes
et les naïades
Bengone, banoumb’, ngondo, les jeunes filles
en fleur
Mais il est asexué, ah! le femmelin sphincter
ptôsé…
Mon président et les éphèbes?
Sa virilité retrouvée!
Il veut faire de ce pays d’hommes
Un vaste théâtre d’ombres
Mon président aime s’entendre parler
Et il faut l’écouter, sinon, l’habitude d’avoir
toujours les armes à la main…
Il apprécie qu’à son oreille ses licteurs
viennent cacaber
Les légendes urbaines complotistes,
promettant d’emblée la sentence.
Mon Président est un monarque républicain
Mais sa cour n’engendre pas de miracles
Mon président vit comme il parle :
Fards, faste, farniente, festivals…
Mon président est un cyborg.
Débarqué chez nous
d’une mystérieuse capsule,
Sa vie est une fiction officielle,
Greffe mal agencée dans un roman national.
Il est le huitième passager, mon président
C’est le philistin revendiquant siège
sous la Coupole
C’est jocrisse fièrement coiffé
d’un bonnet d’âne,
C’est la générosité aux relents de moitrinaire.
Les promesses de mon président sont légion
Promesses en manière de zeppelin en carton.
Pour mieux nous déclarer sa flamme
Ses réalisations en manière de feu grégeois
De fait, il perd à chaque fois nos cœurs
Quand il croit les avoir gagnés.
Mon président a volé notre feu
Pour changer sa vie;
Il répond en paroles jacobines
Ce que lui réclament nos carences vitellines.
Dans nos mémoires, mon président dessine
des esquisses
Aussi valeureuses que les résidus
de nos songes.
Avec mon président, sans coup férir,
Nous voilà poussés sous les fourches
caudines
Une manière d’intronisation éhontée
Pour faire pèlerinage à Canossa.
Mon président est un démocrate,
C’est pourquoi il récuse tout résultat contraire
à sa frégate.
Il se rendra partout
où le conduira le souffle
de la déraison d’État,
Si bien que du haut du Taygète rocheux
il se précipitera.
Si on ne l’y pousse avant.
Bounguili Le Presque Grand, Portgentillaises, La Doxa, 2016