Les cours de vacances, véritable soutien scolaire ou escroquerie désorganisée ?
De nombreuses questions peuvent être soulevées à propos de l’instruction au Gabon. Le cas du soutien scolaire notamment est entourée de nombreuses zones d’ombre. Ce à quoi fait référence notre éditorial. Bonne lecture.
A chacune de mes vacances ici au Gabon, mes moments les plus favorables sont les retrouvailles avec les membres de ma famille parmi lesquels, mes neveux et nièces. Les vacances sont souvent la période de repos, celles des mariages, des réunions familiales, des voyages au village et dans d’autres lieux. J’aime particulièrement aller au village avec ma cohorte de neveux et nièces. J’aime qu’ils découvrent la vie au village, ses usages, ses jeux, les plantations, les récoltes, le débroussaillage des nouvelles plantations, la pêche, etc.
Mais depuis quelques années, ces moments sont écourtés, ils se font de plus en plus rares, voire simplement inexistants. Finie l’éducation villageoise et les échanges paisibles avec nos progénitures. La saison sèche synonyme de grandes vacances scolaires est devenue un prolongement de la saison scolaire et des pluies. Il y a quelques semaines seulement, quand j’ai demandé à voir certains de mes neveux et nièces, on m’a souvent répondu, « ils sont aux cours de rattrapage ».
J’ai ainsi pu voir ces petits bouts de choux épuisés se battre à faire un devoir donné dans le cadre de ces cours. Les matins, le lever se fait difficile, le pas lourd. En réalité les enfants n’en peuvent plus, ils sont fatigués.
Je me suis alors demandé que rattrapent-ils ainsi ? Et aux adultes pourquoi inscrivez-vous vos enfants dans ces cours ? On m’a répondu « c’est obligatoire ! ils ont dit que l’enfant doit faire les cours pour tenir l’année prochaine » histoire de combler des lacunes je suppose.
J’ai encore demandé qui est-ce qui leur dispense ces cours ? on m’a répondu : ce sont les enseignants qu’ils ont eus durant toute l’année scolaire.
J’ai poursuivi, pourquoi ne mettent-ils pas à niveau les enfants durant l’année ? pas de réponse claire, on me dira même que certains enseignants obligent les élèves qui souhaitent avoir des moyennes dans leur matière à faire des cours de rattrapage avec eux durant l’année scolaire, donnant l’essentiel des contenus du programmes dans ces cours bis et non plus dans le cadre officiel des enseignements. Ainsi de cours en cours, les parents déjà appauvris par des conditions de vie difficiles et un niveau de vie élevé se retrouvent asphyxiés financièrement. Les cours coutent au minimum 10 000 franc CFA pour les élèves du primaire et les tarifs augmentent en fonction des classes, des établissements, des intervenants. Chacun pouvant fixer ses tarifs à son gré.
Les cours de vacances sont à la mode et s’imposent désormais comme une « obligation ». Mais paradoxalement le niveau scolaire baisse de plus en plus. Que font les professionnels des sciences de l’éducation dans ce sens ? Qui est à l’origine de ces pratiques ? L’éducation nationale a-t-elle autorisé les établissements à mettre en vigueur ce type de fonctionnement ? Celui-ci est-il encadré ? A-t-on mesuré l’apport de ces enseignements dits complémentaires ? A combien d’enfants ont-ils été bénéfiques ? combien coûtent-ils aux familles ? A qui profitent réellement le marché des cours de soutien et de vacances ? C’est peut-être l’occasion d’interpeller les économistes comme Mays Mouissi sur ces questions sociétales.
L’introduction des cours complémentaires peut se comprendre au vu de la situation chaotique du système éducatif et des grèves à répétition qui jalonnent l’année scolaire, mais ne serait-il pas judicieux de les encadrer, d’en étudier les tenants et les aboutissants, ainsi que leur impact sur les enseignés et les enseignants ?
Naelle Nanda